Rentes d'invalidité de l’AI
Lorsque les mesures de réadaptation de l’AI n’ont pas abouti au résultat escompté ou n’y ont abouti que partiellement, ou lorsque que les mesures sont dès le départ vouées à l’échec, il faut examiner le droit à une rente. Si le taux d’invalidité atteint au moins 40%, la personne a droit à une rente.
Le présent chapitre aborde les différences entre le système de rentes linéaire introduit le 1.1.2022 et l’ancien système, et explique quel système s’applique à quelles personnes et quelle rente est attribuée pour quel taux d’invalidité. Le présent chapitre traite aussi des aspects suivants : différence entre une rente entière et une rente partielle, différence entre une rente ordinaire et une rente extraordinaire, et droit à une rente pour enfant. Le lecteur trouvera en outre des informations sur la naissance du droit à la rente, les possibilités d’adapter une rente et la restitution des rentes versées.
La fin du chapitre met en lumière les conditions particulières applicables au droit à la rente des ressortissants étrangers.
Système de rentes
Le 1.1.2022, un nouveau système de rentes, appelé système linéaire, a été introduit. Dans ce système, la quotité de la rente d’invalidité est fixée en pourcentage d’une rente entière, en fonction du taux d’invalidité reconnu. À partir d’un taux d’invalidité de 70%, la personne a droit à une rente entière. Pour un taux d’invalidité compris entre 50 et 69 %, la quotité de la rente correspond précisément au taux d’invalidité (p. ex. un taux d’invalidité de 55% donne droit à une rente de 55%). Pour les taux d’invalidité compris entre 40 et 49%, la rente s’échelonne de 25 à 47,5 % :
Taux d’invalidité Quotité de la rente
40% 25%
41% 27,5%
42% 30%
43% 32,5%
44% 35%
45% 37,5%
46% 40%
47% 42,5%
48% 45%
49% 47,5%
L’ancien système continue cependant de s’appliquer à certaines personnes. Selon leur taux d’invalidité, ces personnes ont droit à une rente entière, à trois-quarts de rente, à une demi-rente ou à un quart de rente :
Taux d’invalidité Quotité de la rente
40-49% quart de rente
50-59% demi-rente
60-69% trois-quarts de rente
70% ou plus rente entière
Exemple
Exemple 1 : Une décision du 15.3.2022 accorde à Madame A. une rente basée sur un taux d’invalidité de 44%, avec effet au 1.1.2022. Comme Madame A. est une nouvelle bénéficiaire de rente, c’est le nouveau système de rentes qui s’applique. Vu le taux d’invalidité de 44%, elle a droit à une rente de 35%.
Exemple
Exemple 2 : Une décision du 15.3.2022 accorde à Madame B. une rente basée sur un taux d’invalidité de 44%, avec effet au 1.10.2021. Comme le droit à la rente prend naissance avant le 1.1.2022, sa rente sera calculée selon l’ancien système de rentes. Vu le taux d’invalidité de 44%, elle a droit à un quart de rente.
Pour les personnes percevant une rente octroyée en vertu de l’ancien droit (une rente qui a été versée ou dont le droit a pris naissance avant le 1.1.2022), des dispositions transitoires s’appliquent en fonction de l’âge. Ces dispositions transitoires définissent si la rente sera transférée dans le nouveau système et, le cas échéant, quand ce transfert aura lieu. Le critère déterminant est l’âge de la personne assurée au 1.1.2022.
Pour les personnes âgées de 55 ans ou plus au 1.1.2022 :
L’ancien système de rentes reste déterminant en vertu de la garantie des droits acquis. Toute révision de la rente sera également effectuée selon les dispositions de l’ancien droit. Une telle révision intervient si l’état de santé de la personne assurée s’améliore ou se détériore de manière significative. La rente peut alors être augmentée, diminuée ou supprimée.
Pour les personnes ayant entre 30 et 54 ans au 1.1.2022 :
Si un changement de leur taux d’invalidité d’au moins 5% est constaté dans le cadre d’une révision de rente, c’est le nouveau système de rentes qui s’applique pour déterminer l’augmentation, la diminution ou la suppression de la rente.
Toutefois, la rente actuelle est maintenue dans le cas où il en résulte une «distorsion». Il y a distorsion lorsque l’état de santé se détériore et que le taux d'invalidité augmente, mais que, selon le nouveau système, cela entraînerait une diminution du droit à la rente.
Exemple
Exemple 1 (distorsion) : Depuis 2018, Monsieur C. perçoit trois-quarts de rente (soit 1500 francs) pour un taux d’invalidité de 61%. Son état de santé s’est dégradé et le taux d’invalidité a augmenté de 7%, passant à 68%. Selon le nouveau système, il devrait recevoir une rente de 68% (soit 1360 francs), ce qui reviendrait à une diminution de la rente de 140 francs. Par conséquent, Monsieur C. conserve sa rente de 1500 francs.
On parle également de distorsion quand l’état de santé s’améliore et que le taux d’invalidité diminue de ce fait, mais que cela entraînerait une augmentation du droit à la rente en raison du nouveau système de rentes.
Exemple
Exemple 2 (distorsion) : Depuis 2016, Monsieur D. perçoit une demi-rente (soit 1000 francs) pour un taux d’invalidité de 59%. Son état de santé s’est amélioré et le taux d’invalidité a diminué de 7%, passant à 52%. Selon le nouveau système, il devrait recevoir une rente de 52% (soit 1040 francs), ce qui reviendrait à une augmentation de la rente de 40 francs. Par conséquent, Monsieur D. conserve sa rente de 1000 francs.
Pour les personnes âgées de moins de 30 ans au 1.1.2022 :
Si un changement de leur taux d’invalidité d’au moins 5% est constaté dans le cadre d’une révision de rente, c’est le nouveau système de rentes qui s’applique. Au plus tard après 10 ans, donc en 2032, la rente est transférée dans le nouveau système de rentes, même si le taux d’invalidité est inchangé. Si cela entraîne une baisse du montant de la rente, le montant actuel est versé jusqu'à ce que le taux d’invalidité se modifie d’au moins 5%.
Une année de cotisation est réputée accomplie lorsque :
- la personne a payé elle-même des cotisations en fonction du revenu d’une activité lucrative dépendante ou indépendante pendant au moins 11 mois,
- la personne était mariée ou vivait sous le régime du partenariat enregistré avec une personne qui a versé au moins le double de la cotisation minimale,
- la personne peut bénéficier de bonifications pour tâches éducatives pour la prise en charge d’enfants de moins de 16 ans, ou
- la personne peut bénéficier de bonifications pour tâches d’assistance pour la prise en charge de proches parents dans son propre ménage.
Exemple
Madame M. a divorcé il y a deux ans. Comme son mari a versé plus du double de la cotisation minimale, on considère qu’elle a versé des cotisations AVS/AI jusqu’à son divorce. Après le divorce, elle a commencé à travailler comme salariée et payé elle-même ses cotisations AVS/AI. Il y a un an, Madame M. a été victime d’un accident vasculaire cérébral et, depuis, ne peut plus travailler. Comme elle a accumulé plus de trois années de cotisations au moment où se produit l’invalidité, elle a droit à une rente ordinaire, une fois le délai d’attente d’un an écoulé.
Rente entière ou rente partielle ?
La personne qui a droit à une rente ordinaire et qui a versé chaque année sans interruption des cotisations à l’AVS/AI depuis l’âge de 20 ans, reçoit en cas d’invalidité une rente entière. La personne qui, au contraire, n’a pas versé de cotisations pendant quelques années présente des lacunes de cotisations et ne reçoit, en cas d’invalidité, qu’une rente partielle, plus basse. Les lacunes de cotisations se produisent souvent du fait qu’une personne vit temporairement à l’étranger sans adhérer à l’assurance facultative AVS/AI pendant cette période. Les ressortissants étrangers arrivés en Suisse après l’âge de 20 ans ont eux aussi des lacunes de cotisations.
Pour les personnes exerçant une activité lucrative dépendante et pour les bénéficiaires d’indemnités journalières de l’assurance chômage, les cotisations AVS/AI sont transmises à la caisse de compensation par l’employeur ou par la caisse de chômage. Il arrive cependant que l’employeur déduise les cotisations du salaire de ses employés mais ne les transmette pas à la caisse de compensation. Toutefois, si l’employé peut prouver à l’aide des certificats de salaire ou des décomptes de salaire que les cotisations ont été déduites de son salaire, ces sommes sont prises en compte par la caisse de compensation et l’employé n’a pas de lacunes de cotisations.
Les personnes exerçant une activité lucrative indépendante et les personnes non actives doivent s’annoncer elles-mêmes à la caisse de compensation. Si une personne n’a pas versé de cotisation par ignorance ou par insouciance, elle peut payer les cotisations manquantes pour les cinq dernières années. Il n’est pas possible de racheter davantage d’années de cotisation, de telle sorte que des lacunes de cotisations peuvent subsister.
La personne qui présente des lacunes de cotisations et ne reçoit donc qu’une rente partielle en cas d’invalidité, doit s’attendre à ce que le montant de sa rente soit plus bas que si elle avait versé des cotisations pendant toute la durée requise. La différence entre les montants correspond au rapport entre le nombre effectif d’années de cotisation et le nombre total d’années où les cotisations auraient dû être versées.
Exemple
Monsieur K. est âgé de 40 ans au moment où l’AI constate un taux d’invalidité de 75% et lui accorde une rente entière. Or, Monsieur K. est arrivé en Suisse à l’âge de 30 ans et n’a versé de cotisations AVS/AI qu’à partir de ce moment. Il reçoit donc une rente partielle équivalant à environ 50% d’une rente entière. Il doit donc se contenter d’une rente AI relativement basse. Toutefois, s’il a déjà versé des cotisations à l’étranger avant l’âge de 30 ans, il se peut que l’assurance de l’état où il se trouvait auparavant lui verse aussi une rente partielle.
Rentes selon le nouveau système de rentes :
- Rente entière (taux d’invalidité de 70% ou plus) : entre 1195 et 2390 francs
- Rente partielle (taux d’invalidité de 40-69%) : pourcentage d’une rente entière selon la quotité définie.
Rentes selon l’ancien système de rentes :
- Rente entière : entre 1225 et 2450 francs
- Trois-quarts de rente : entre 919 et 1838 francs
- Demi-rente : entre 613 et 1225 francs
- Quart de rente : entre 307 et 613 francs
Le fait qu’une personne reçoive une rente maximale, une rente minimale ou une rente intermédiaire dépend du salaire annuel moyen qu’elle a obtenu depuis l’âge de 20 ans et sur lequel les cotisations AVS/AI ont été versées. Le calcul tient compte en outre des éventuelles bonifications pour tâches éducatives et pour tâches d’assistance.
Exemple
Monsieur S. a fait un apprentissage de commerce et a ensuite travaillé pendant trois ans comme employé de commerce. Puis, il a rattrapé la maturité en suivant une deuxième voie de formation et a étudié la médecine. Peu après avoir terminé sa formation, il tombe gravement malade, et l’AI lui une rente entière. Monsieur S. a versé des cotisations AVS/AI depuis son apprentissage (à titre de personne exerçant une activité lucrative pendant son apprentissage et la période où il a travaillé, et à titre de personne n’exerçant pas d’activité lucrative pendant ses études). Il n’a donc pas de lacunes de cotisations et reçoit une rente entière (échelle de rente 44). Mais comme il a versé des cotisations plutôt modestes, la rente entière ne se montent qu’à 1400 francs par mois.
Rentes extraordinaires
Les personnes handicapées de naissance ou précoces (qui sont devenues invalides avant l’âge de 20 ans, donc avant l’obligation de verser des cotisations AVS/AI), ne remplissent pas la durée minimale de cotisation de 3 ans et, de ce fait, ne reçoivent pas de rente ordinaire. En revanche, elles ont droit à une rente extraordinaire, d’un montant fixe :
Rentes selon le nouveau système de rentes :
- Rente extraordinaire entière (taux d’invalidité de 70% ou plus) : 1633 francs
- Rente extraordinaire partielle (taux d’invalidité entre 40-69%) : pourcentage d’une rente entière selon la quotité définie.
Rentes selon l’ancien système de rentes :
- rente extraordinaire entière : 1633 francs
- trois-quarts de rente extraordinaire : 1225 francs
- demi-rente extraordinaire : 817 francs
- quart de rente extraordinaire : 409 francs
En principe, les rentes extraordinaires sont versées uniquement aux personnes qui ont leur domicile et leur résidence en Suisse. En règle générale, les personnes qui quittent la Suisse ne reçoivent plus de rente extraordinaire. Il existe des exceptions pour les citoyens suisses et pour les ressortissants de l’UE : la rente extraordinaire continue à leur être versée lorsqu’ils émigrent dans un pays de l’UE, à condition qu’ils aient exercé une activité lucrative en Suisse ou dans un pays membre de l’UE avant la survenance de l’incapacité de travail. Avant d’émigrer, il vaut donc la peine de prendre contact avec la caisse de compensation et de s’informer sur ses droits.
Exemple
Madame T. souffre de dystrophie musculaire depuis sa naissance. Comme elle ne peut travailler que dans un cadre protégé, elle reçoit de l’AI à partir de l’âge de 18 ans une rente extraordinaire entière de 1633 francs. A l’âge de 22 ans, elle envisage de s’installer en France chez sa sœur. Comme elle perdrait sa rente, elle décide de rester en Suisse.
Rentes pour enfants
Les bénéficiaires d’une rente reçoivent, pour chaque enfant de moins de 18 ans, une rente pour enfant qui s’ajoute à leur propre rente (rente principale). Si l’enfant est encore en formation, la rente est versée jusqu’à la fin de la formation, au maximum jusqu’à l’âge de 25 ans. L’AI demande donc régulièrement des preuves que la formation est suivie en fonction d’un but précis et qu’elle s’effectue de façon conforme aux exigences. La rente pour enfant se monte à 40% de la rente principale.
Lorsqu’il y a plusieurs enfants, il peut arriver que les rentes (rente principale et rentes pour enfant) aboutissent à une surindemnisation. Dans ce cas, la règle qui vaut est la suivante : lorsque les rentes pour enfant jointes à la rente principale du père ou de la mère dépassent 90% du revenu annuel moyen déterminant, servant de base au calcul de cette rente, elles sont réduites.
Naissance du droit à la rente
Le droit à la rente naît seulement lorsque 6 mois se sont écoulés après l’annonce à l’AI, au plus tôt lorsque la personne a atteint l’âge de 18 ans. Une personne a également droit à une rente lorsque qu’elle a présenté une incapacité de travail d’au moins 40% en moyenne pendant un an, sans interruption notable (délai d’attente). Le délai d’attente est interrompu par une pleine capacité de travail de 30 jours ou plus et recommence à courir depuis le début. Lorsque l’évolution de la maladie fluctue beaucoup, les médecins traitants devraient qualifier de placements à l’essai les tentatives de travail dont l’issue est incertaine.
Bien que le droit à la rente ne commence qu’après l’écoulement du délai d’attente d’un an, il faudrait – lorsque le handicap sera probablement durable – que l’annonce à l’AI ait lieu plus tôt. En effet, l’annonce à l’AI permet, d’une part, d’examiner l’opportunité de mesures de réadaptation professionnelle, d’autre part, d’avoir une date de référence. En effet, la rente peut seulement être versée 6 mois après qu’une personne a pris contact avec l’AI. En d’autres termes, il faudrait que l’annonce à l’AI ait lieu au plus tard dans le courant du 6e mois qui suit le début de l’incapacité de travail.
Exemple
Le 1er juin 2023, Monsieur K. tombe d’un échafaudage et se blesse si grièvement qu’il reste paraplégique. Comme la réadaptation dure longtemps, il ne s’annonce à l’AI que 10 mois plus tard, le 1er avril 2024. Étant donné l’état de santé de Monsieur K., cette démarche a lieu suffisamment tôt pour l’examen des mesures de réadaptation professionnelle. Cependant si Monsieur K., du fait de son handicap, subit une perte de gain qui lui donne droit à une rente, il n’aura droit à une rente qu’à partir d’octobre 2024 (6 mois après l’annonce à l’AI).
Si Monsieur K. s’était annoncé à l’AI dans les 6 mois qui ont suivi sa chute, soit en décembre 2023, il aurait déjà reçu une rente après l’écoulement du délai d’attente d’un an, à savoir à partir de juin 2024.
L’état de santé de la personne bénéficiaire d’une rente s’est détérioré, sans amélioration depuis plus de trois mois, et, de ce fait, le taux d’invalidité a augmenté d’au moins 5% (nouveau système) ou de manière assez significative pour résulter en un changement du droit à la rente (ancien système). Dans ce cas, la rente est augmentée 3 mois après la survenance de la détérioration, toutefois au plus tôt à partir du moment où la personne a présenté une demande d’augmentation.
L’état de santé de la personne bénéficiaire d’une rente s’est amélioré, sans redécliner depuis plus de trois mois, et, de ce fait, le taux d’invalidité a diminué d’au moins 5% (nouveau système) ou de manière assez significative pour résulter en un changement du droit à la rente (ancien système). Dans ce cas, la rente est abaissée ou supprimée au moyen d’une décision. La diminution ou la suppression ont lieu au plus tard à la fin du mois qui suit la décision. Une diminution ou une suppression rétroactive ne sont possible que si le ou la bénéficiaire d’une rente a manqué à l’obligation de renseigner.
La situation a changé (p. ex. augmentation hypothétique du taux d’emploi à cause de l’entrée à l’école des enfants, réduction hypothétique du taux d’emploi à cause de la naissance d’un autre enfant, etc.) à tel point que la base servant à l’évaluation du taux d’invalidité est, elle-aussi, notablement modifiée. Selon le changement, il peut en résulter une augmentation, une diminution ou une suppression de la rente.
Depuis le 1er janvier 2024, pour déterminer le revenu avec invalidité (« revenu d’invalide »), on procède à une déduction forfaitaire sur les chiffres de l’enquête suisse sur la structure des salaires ESS. Cette nouvelle réglementation entraîne, au cours des années 2024-2027, une révision de certaines rentes AI en cours. La lettre circulaire AI n° 432 explique qui est concerné par cette révision.
Exemple
Comme il présente un taux d’invalidité de 55%, Monsieur N. (45 ans) touche une rente depuis quelques années. Au mois de juillet, il est victime d’un grave accident et reste atteint d’une incapacité de travail et de gain de 100%. Comme son état de santé s’est dégradé et que le taux d’invalidité a augmenté de plus de 5%, il a droit à une rente entière après 3 mois, dès le mois d’octobre. Pour ce faire, il faut cependant que Monsieur N. signale l’aggravation de son état de santé à l’AI au plus tard en octobre. En effet, l’augmentation de la rente a lieu au plus tôt à partir du moment où la demande d’augmentation a été déposée. Si Monsieur N. s’adresse à l’AI seulement en décembre, sa rente ne sera augmentée qu’à partir de décembre.
Exemple
Madame S., âgée de 50 ans, bénéficie depuis quelques années d’une rente sur la base d’un taux d’invalidité de 60%. Lors de la révision que l’AI effectue tous les 2 à 4 ans, il apparait que l’état de santé de Madame S. s’est amélioré et qu’elle est capable de travailler à 50%. Outre son état de santé, sa situation a, elle aussi, changé. Depuis peu, elle vit séparée de son mari et les enfants qui vivent avec elles vont tous à l’école. Dans ces conditions, en l’absence d’atteinte à la santé, elle aurait une capacité de gain de 70% et non plus de 50% seulement.
Dans cette situation, l’AI doit non seulement tenir compte de l’amélioration de l’état de santé mais aussi du changement de la situation de l’assurée. Le taux d’invalidité de Madame S. continue d’être calculé selon la méthode mixte. L’augmentation de la capacité de travail signifie que le taux d’invalidité passe à 45% et que Madame S. n’a plus droit qu’à une rente de 37,5%.
Le 16 avril, l’AI prononce une décision selon laquelle la rente est réduite, sur la base de la baisse du taux d’invalidité de 60% à 45%. La rente de Madame S. sera donc réduite avec effet à fin mai ; dès le mois de juin, elle ne recevra qu’une rente de 37,5% pour un taux d’invalidité de 45%.
Les rentes peuvent aussi être révisées lorsque l’AI, à l’occasion du réexamen du droit à la rente, constate qu’il existe un potentiel de réadaptation. L’AI peut alors ordonner des mesures de nouvelle réadaptation. Si ces mesures ont pu, de l’avis de l’AI, améliorer la capacité de gain d’une manière déterminante pour le calcul de la rente, la rente est réduite ou supprimée. La même règle vaut lorsqu’une personne peut nouvellement obtenir par elle-même un revenu provenant d’une activité lucrative ou qu’elle parvient à augmenter le revenu qu’elle obtenait précédemment (réadaptation venant de l’initiative de l’assuré). Lorsque la rente est diminuée ou supprimée dans de tels cas, un délai de transition de 3 ans s’applique. L’exemple qui suit illustre ce que signifie ce délai de transition :
Exemple
Madame T. a dû renoncer à travailler à cause d’une grave dépression et a reçu pendant plusieurs années une rente entière de l’AI ainsi qu’une rente entière de sa caisse de pension. Comme son état de santé s’est amélioré, elle peut exercer une activité lucrative à 50% et en informe l’AI. À la suite de cette information, l’AI et la caisse de pensions transforment la rente entière en une rente pour un taux d’invalidité de 50%.
18 mois plus tard, la santé psychique de Madame T. s’altère à tel point qu’elle doit entrer en clinique pour 4 à 6 semaines. Étant donné que, pendant le délai de transition de 3 ans, elle a été frappée d’une incapacité de travail d’au moins 50% pendant plus de 30 jours, Madame T. reçoit à nouveau immédiatement une rente entière (prestation de transition). En même temps, l’AI procède à des examens médicaux, réexamine le taux d’invalidité et prend une nouvelle décision au sujet de la rente.
Le délai de transition de 3 ans a en outre pour conséquence que Madame T. reste assurée auprès de son ancienne caisse de pensions pendant cette période et qu’aucun rapport de prévoyance ne se crée auprès de son nouvel employeur.
Toutefois, les conditions posées à une telle reconsidération sont très strictes. Il ne suffit pas qu’une nouvelle expertise parvienne à une autre appréciation et évaluation que l’expertise précédente. Si la décision initiale d’accorder une rente était tout à fait pertinente étant donné la situation matérielle et juridique constatée alors, il n’existe pas d’erreur indubitable, et la décision ne doit pas être reconsidérée. Par ailleurs, une reconsidération est toujours exclue lorsque l’affaire a été jugée par un tribunal.
Exemple
Monsieur L. est ouvrier du bâtiment et souffre de maux de dos. Dans un rapport médical, sa rhumatologue a attesté à Monsieur L. une incapacité de travail de 100% dans l’activité qu’il exerçait jusqu’ici. En 2010, l’AI lui a, de ce fait, accordé une rente entière. À l’occasion d’une des révisions régulières de la rente, l’AI ordonne une expertise rhumatologique. Celle-ci parvient à la conclusion que l’état de santé de Monsieur L. est inchangé. L’expert partage l’avis de 2010 de la rhumatologue traitante selon lequel Monsieur L. ne peut plus travailler comme ouvrier du bâtiment. Selon lui, Monsieur L. dispose cependant d’une capacité de travail de 80% dans le cadre d’une activité physique légère.
Or, en 2010, la rhumatologue traitante ne s’était pas exprimée au sujet de la capacité de travail de Monsieur L. dans le cadre d’une activité adaptée. En outre, à l’époque, les documents médicaux n’avaient pas été contrôlés par le service médical de l’AI. Dans ces circonstances, la décision prise par l’AI en 2010 d’accorder une rente à Monsieur L. s’avère manifestement erronée. Dans ce cas, l’AI peut reconsidérer la décision entrée en force et, selon le résultat de la comparaison des revenus, diminuer ou supprimer la rente.
Si en 2010, la rhumatologue traitante s’était exprimée explicitement sur la capacité de travail dans le cadre d’une activité adaptée, et si les documents médicaux avaient été contrôlés et confirmés par le service médical de l’AI, il ne serait pas admissible de reconsidérer la décision d’accorder une rente, et Monsieur L. continuerait à toucher une rente entière.
La reconsidération d’une décision est laissée à l’appréciation de l’office AI : si une personne estime qu’une décision antérieure était manifestement erronée, elle peut présenter une demande de reconsidération. Si l’office AI refuse d’entrer en matière sur la demande de reconsidération, la personne ne peut rien faire, car il n’existe pas de droit exigible à la reconsidération d’une décision.
Restitution de rentes
La personne qui touche une rente est tenue de signaler immédiatement les changements notables de sa situation personnelle et économique (p. ex. état de santé, revenus, situation familiale). Si la personne a contrevenu à l’obligation de renseigner et s’il s’avère ultérieurement que la rente aurait pu être réduite ou même supprimée plus tôt si la personne avait fourni l’information en temps utile, l’AI peut demander la restitution des rentes touchées indûment ou les déduire de la rente qu’elle continue à verser.
La personne ne peut se défendre contre une demande de restitution correcte qu’en invoquant le motif que le droit à la restitution est prescrit. La prescription se produit lorsque l’administration ne demande pas la restitution des rentes en l’espace de trois ans à compter du moment où elle a eu connaissance du motif de la demande de restitution, mais au plus tard après cinq ans. L’administration ne peut donc demander la restitution des rentes qui datent de plus de 5 ans.
Si la demande de restitution est correcte et que de surcroît elle a été présentée en temps voulu, la personne n’a plus que la possibilité de déposer une demande de remise. Pour qu’une restitution soit remise, deux conditions doivent être réunies à la fois. D’une part, il faut apporter la preuve que l’obligation de renseigner n’a été violée, ni intentionnellement ni par négligence grave, et que la personne a donc touché la rente de bonne foi. D’autre part, la restitution doit en outre placer l’intéressé dans une situation financière difficile.
Exemple
Madame B. reçoit une rente ainsi que des rentes pour enfant pour ses deux filles. Elle touche en outre des prestations complémentaires. Après sa maturité, sa fille aînée se rend aux États-Unis, travaille comme au pair et suit une école de langues. Comme sa fille fréquente cette école, Madame B. suppose qu’elle est encore en formation et continue à toucher les deux rentes pour enfant. L’administration juge la situation différemment. Comme la fille aînée, ayant obtenu sa maturité, ne se trouve plus en formation mais exerce au contraire une activité rémunérée, l’AI demande la restitution de ces rentes pour enfant. Madame B. peut cependant prouver sa bonne foi. Comme la famille a droit de surcroît à des prestations complémentaires, la condition demandant l’existence d’une situation financière difficile est aussi remplie. La demande de remise est approuvée et Madame B. ne doit pas rembourser les rentes pour enfant indûment perçues pour sa fille aînée.
- Ressortissants des états faisant partie de l’UE et de l’AELE :
Du fait de l’accord sur la libre circulation, les ressortissants des états de l’UE et de l’AELE sont traités comme les citoyennes et citoyens suisses. En ce qui concerne la condition fixant la durée minimale de cotisation à 3 ans pour l’octroi d’une rente ordinaire, la durée de cotisation acquise dans un pays de l’UE ou de l’AELE est prise en compte. Toutefois, la personne doit avoir versé des cotisations en Suisse pendant au moins 1 an.
Les rentes continuent à être versées en cas de retour dans le pays d’origine.
- Ressortissants d’états qui ont conclu une convention de sécurité sociale avec la Suisse :
La plupart des accords prévoient que les ressortissants des états contractants ont droit à une rente ordinaire aux mêmes conditions que les citoyennes et citoyens suisses. Contrairement à ce qui se passe pour les personnes des états de l’UE et de l’AELE, les cotisations versées dans un autre pays ne sont toutefois pas prises en compte quand on vérifie si la personne atteint la durée minimale de cotisation.
Il faut aussi savoir que toutes les conventions de sécurité sociale ne prévoient pas de droit à une rente extraordinaire. Si ce droit est prévu, il ne prend souvent naissance qu’après que la personne a résidé 5 ans en Suisse sans interruption.
En cas de retour dans le pays d’origine les rentes continuent d’être versées uniquement à partir d’un taux d’invalidité de 50%.
- Ressortissants d’états qui ne disposent pas d’une convention de sécurité sociale avec la Suisse :
Les ressortissants d’états qui n’ont pas conclu de convention de sécurité sociale ont droit à une rente ordinaire aux mêmes conditions que les citoyennes et citoyens suisses. En règle générale, ils n’ont cependant pas droit à une rente extraordinaire. Le versement de la rente est lié au domicile et au séjour en Suisse. La personne qui retourne dans son pays d’origine ne reçoit donc plus de rente. En outre, aucune rente pour enfant n’est versée lorsque les enfants résident à l’étranger.
- Réfugiés reconnus et apatrides :
Ces personnes ont elles aussi droit à une rente ordinaire dans les mêmes conditions que les citoyennes et citoyens suisses.
Le droit à une rente extraordinaire est également régi par les mêmes conditions que pour les citoyennes et citoyens suisses. Toutefois, le droit prend naissance seulement après que la personne a séjourné 5 ans en Suisse sans interruption.
Ici aussi, le versement de la rente est lié à la résidence et au séjour en Suisse. Dans un arrêt rendu le 21 janvier 2020, le Tribunal fédéral, en vertu de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés et contrairement à l’art. 1 de l’Arrêté fédéral concernant le statut des réfugiés et apatrides dans l’assurance-vieillesse et survivants et dans l’assurance-invalidité (ARéf), a décidé que les rentes pour enfants seraient versées également pour les enfants résidant à l’étranger.
Exemple
Monsieur M., ressortissant portugais, vit et travaille depuis 2014 en Suisse. En mars 2021, on décèle chez lui une sclérose en plaques et il obtient une rente basée sur un taux d’invalidité de 45% dès mars 2022. Étant donné que sa famille vit au Portugal, Monsieur M. rentre dans son pays d’origine. Comme il est citoyen de l’UE, la rente lui est également versée au Portugal.
Si Monsieur M. était ressortissant d’un état avec lequel la Suisse a conclu une convention de sécurité sociale, la rente ne lui serait pas versée dans son pays d’origine, car son taux d’invalidité devrait atteindre au moins 50%. S’il était ressortissant d’un état qui n’a pas conclu de convention, il ne pourrait même pas exporter une rente de 50%.
- Système de rentes / droit à la rente :
art. 28b LAI - Passage des rentes actuelles au nouveau système de rentes :
Dispositions transitoires de la modification du 19 juin 2020, let. b et c - Durée minimale de cotisations :
art. 36 LAI , art. 29ter, al. 2 LAVS - Rente complète / rente partielle :
art. 29ter al. 1, art. 34 ss. et art. 38 LAVS - Montant de la rente ordinaire :
art. 37 LAI ; art. 29quater-30 et art. 34 LAVS - Rentes extraordinaires :
art. 39-40 LAI - Rente pour enfant :
art. 35, 38, 38bis et 40, al. 2 LAI, art. 33bis RAI, art. 25 LAVS, art. 47, 49-49ter RAVS - Début du droit à la rente :
art. 28 et 29 LAI - Révision de la rente en cas de détérioration ou d’amélioration de l’état de santé :
art. 17 LPGA, art. 87, 88a et 88 bis RAI
- Révision de rente axée sur la réadaptation / période de transition et prestation transitoire :
art. 8a, art. 32-34 LAI ; art. 30 et 31 RAI - Restitution de rentes / prescription / remise :
art. 25 LPGA, art. 2-5 OPGA - Droit à la rente des ressortissants d’états avec convention de sécurité sociale :
Diverses conventions de sécurité sociale - Droit à la rente des ressortissants d’états sans convention de sécurité sociale :
art. 6, al. 2, art. 9, al. 3 et art. 39, al. 3 LAI - Droit à la rente des réfugiés :
arrêté fédéral concernant le statut des réfugiés et des apatrides dans l’AVS et l’AI – arrêt du Tribunal fédéral du 21 janvier 2020 (146 V 87) - Directives administratives concernant l’invalidité et la rente :
Circulaire sur l’invalidité et les rentes dans l’assurance-invalidité (CIRAI) - Directives administratives concernant les dispositions transitoires (système de rentes linéaire) :
Circulaire relative aux dispositions transitoires concernant le système de rentes linéaire (Circ. DT DC AI)