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Xenia, petite étoile au cœur de la famille

« Avoir un enfant handicapé n’est pas seulement un défi émotionnel, c’est aussi un défi financier. »

Urs R., papa de Xenia
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Pour Oxana et Urs R., la vie tourne autour de Xenia depuis bientôt huit ans : leur fille est lourdement handicapée en raison d’une anomalie génétique extrêmement rare et a besoin d’une assistance 24 heures sur 24. Un défi quotidien pour cette famille établie à Sumiswald, dans l’Emmental bernois.

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Xenia et ses parents vivent dans une charmante maison un peu excentrée. Pour y accéder, on emprunte une petite route escarpée en lacets, sous les yeux des vaches et des chèvres, jusqu’à un petit plateau. C’est Urs qui a construit la maison familiale, et sa femme Oxana l’a soigneusement aménagée. « À ce moment-là, on ne se doutait pas qu’elle accueillerait un enfant avec des besoins particuliers », confie Urs. Entre-temps, il a fallu aménager et goudronner le chemin menant à la maison pour qu’il puisse être emprunté par le véhicule adapté.

L’intérieur est aéré et accueillant. Xenia dort au milieu du salon dans un fauteuil « cocon ». On ne perçoit d’elle qu’une respiration rauque par intermittence. « En ce moment, Xenia est un peu enrhumée et elle n’est pas très en forme. Elle dort beaucoup », explique Oxana en caressant affectueusement le ventre de sa fille. Puis elle commence à la taquiner avec des petits pincements. « Il est temps qu’elle se réveille pour prendre le goûter. » Oxana et Urs accordent une grande importance aux repas. Car si Xenia est dépendante pour la plupart des gestes quotidiens, elle sait déglutir seule et aime manger. Cela lui donne l’occasion de découvrir différentes saveurs et d’éveiller ses sens. « Xenia a une sonde gastrique. On pourrait tout aussi bien la nourrir de cette manière. Mais nous ne voulons pas la priver du plaisir de manger », raconte Oxana. « Il est important qu’elle puisse préserver et exercer le plus longtemps possible le peu de capacités dont elle dispose. Même si cela nous prend beaucoup de temps et ne nous simplifie pas la vie. »

Un caprice de la nature

La grossesse d’Oxana s’est déroulée sans complication, tout comme la naissance. Mais après un certain temps, la maman a remarqué que son nourrisson avait un comportement étrange. Et un jour, Xenia s’est mise à convulser et la maman a compris qu’il s’agissait d’une crise d’épilepsie. À partir de là, tout s’est enchaîné. Xenia a été transportée d’urgence à l’hôpital pédiatrique de Berne, puis soumise à d’innombrables examens. Mais les résultats n’étaient pas probants. « Nous ne savions pas à quoi nous en tenir, c’était un vrai cauchemar. Nous étions rongés par l’inquiétude », se souvient Oxana. Au bout de deux longues années, les parents ont enfin obtenu un diagnostic.

Le handicap de Xenia est dû à un gène défectueux. Cette anomalie génétique – qui porte le nom de SCN8A – a été recensée chez moins de 400 enfants dans le monde. Elle n’est pas héréditaire et les causes sont inexpliquées. « C’est juste un caprice de la nature », analyse Oxana. « Et Xenia est plus fortement touchée que d’autres. Car le spectre de cette anomalie est très large : chez certains enfants, on ne remarque presque rien. Et puis, il y a des enfants comme Xenia. »

Xenia ne marche pas, ne parle pas et ne voit très probablement pas non plus. Elle ne peut ni manger ni boire toute seule. Les parents ne savent pas ce qu’elle perçoit ni ce qu’elle comprend de ce qui se passe autour d’elle. Xenia a plusieurs crises d’épilepsie par jour, avec à chaque fois pour conséquence un « redémarrage » du cerveau qui l’empêche d’apprendre quoi que ce soit et de se développer. En revanche, les parents sont convaincus que Xenia réagit aux gens qui l’entourent et manifeste des émotions. « Xenia nous fait savoir comment elle se sent ou ce qu’elle veut. À sa manière », enchaîne Urs. « Il y a quelques semaines, Xenia a dû être opérée des hanches. Elle avait très mal et pleurait beaucoup. Heureusement, elle nous montre clairement quand elle souffre. Mais comme elle ne peut pas parler ni exprimer précisément ce qu’elle a, nous lui donnons de temps en temps un analgésique si nous avons l’impression que cela peut l’aider. Nous préférons jouer la carte de la sécurité. »

À la limite de l’épuisement

Entre-temps, les tentatives de réveil taquines d’Oxana ont fait leur effet. Xenia s’étire et baille avec volupté. Oxana s’empresse de rejoindre sa fille qui se réveille, lui parle et veille à ce qu’elle n’avale pas de glaires, pendant qu’Urs se met spontanément à préparer le goûter. Les parents forment une équipe bien rodée. « C’est moi qui me charge de donner le goûter », annonce Urs en prenant sa « crevette » – comme il appelle affectueusement Xenia – sur ses genoux. Aujourd’hui, il y a du flan au chocolat. Avec une patience infinie, Urs soutient la tête de Xenia, la nourrit cuillère après cuillère, lui essuie la bouche et veille à ce qu’elle n’avale pas de travers. Le goûter dure une heure. « La prise en charge de Xenia prend énormément de temps et est très intensive », explique Urs. « Il faut que l’un de nous deux soit à ses côtés en permanence au cas où elle s’étoufferait ou ferait une crise d’épilepsie. »

Une prise en charge qui pousse les deux parents actifs - Urs travaille à 60%, Oxana à 40% - à la limite de leurs capacités. « Avoir un enfant en situation de handicap n’est pas seulement un défi émotionnel, c’est aussi un défi financier », confie Urs. Et Oxana d’ajouter : « Quand tout va bien, nous pouvons assumer entièrement la prise en charge. Pour autant que tout aille bien... Honnêtement, je ne sais même plus comment nous avons fait à l’époque. » « À l’époque», c’était il y a un peu plus de quatre ans. Xenia avait besoin de soins accrus en raison d’une amygdalite. Des nuits blanches, une énorme charge permanente... Oxana et Urs n’en pouvaient plus. Le couple a dû trouver une solution.

Une solution idéale

C’est le cœur lourd que les parents ont décidé de confier Xenia à une institution trois jours par semaine. « C’est ce qu'il y a de mieux pour nous tous », affirme Oxana. « Nous amenons Xenia le samedi soir et allons la rechercher le mercredi. Cela nous permet, à Urs et moi, d’avoir à nouveau un peu de temps pour nous. Nous apprécions surtout le dimanche, où nous pouvons faire de la randonnée ou rendre visite à des amis », raconte Oxana. Les parents se partagent le reste du temps de garde. Pour Xenia, il est important que le déroulement de la journée soit structuré. Alors qu’Urs se rend tôt au travail, Oxana se charge du réveil de Xenia. « Le matin, nous prenons notre temps. Nous faisons un gros câlin au lit. Ensuite, j’habille Xenia et je lui donne son petit-déjeuner – qui à lui seul dure environ une heure et demie. Ensuite, nous allons généralement prendre l’air. Je jardine sous le regard inspecteur de Xenia. Pas vrai, Xenia ? » sourit Oxana en câlinant sa fille.

Les parents ont calqué le rituel de la journée sur celui de l’institution afin de faciliter les transitions pour leur fille. Dans l’institution, Xenia va à l’école, suit des thérapies et est entourée d’autres enfants en situation de handicap. « Xenia se sent très bien dans l’institution. C’est le plus important pour nous », s’accordent à dire Oxana et Urs. « Et d’après le corps enseignant, elle s’en sort super bien. Nous sommes très fiers de notre fille. »

Il va sans dire que les parents attendent chaque semaine avec impatience le mercredi pour récupérer Xenia. Car c’est elle qui, comme une étoile, guide la vie de la famille.

Xenia avec ses parents dans la forêt

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